« C’est la nuit qu’il est beau de croire à la lumière ! » : pas beaucoup de motifs d’espoirs en ce début d’année. En fait si, un : le succès de l’appel « L’affaire du siècle » lancé par quatre associations (Notre Affaire à Tous, la Fondation pour la Nature et l’Homme, Greenpeace France et Oxfam France) annonçant leur intention « d’attaquer l’Etat français en justice pour qu’il respecte ses engagements climatiques et protège nos vies, nos territoires et nos droits ». Avec déjà près de deux millions de signatures, c’est aujourd’hui la pétition qui a recueilli le plus de succès dans notre pays : de quoi faire pâlir, ou peut-être plutôt verdir, les gilets jaunes.
Bien sûr, certains ont pu contester ce chiffre, au motif que les signatures n’ont pas été recueillies sur un site certifié, et que les organisateurs ne pouvaient garantir qu’il n’y avait pas eu « bourrage des urnes » électroniques. Mais ceux-ci s’en sont expliqué et ont assuré avoir mis en place les dispositifs pour supprimer les doublons tout en garantissant la confidentialité des informations personnelles des signataires.
Motif d’espoir, le mouvement montre d’abord que, malgré la reculade sur la fiscalité écologique, l’engagement de nos concitoyens pour les défis de la planète reste aujourd’hui massif ; etce même si on a pu opposer la question des fins de mois pour nombre d’entre eux à celle, annoncée, du monde qui a permis à l’humanité de se développer. S’il n’est pas sûr que, quoique certains leaders écologistes aient pu en penser ou en dire, l’immense majorité de ceux qui ont occupé les ronds points soient très soucieux de l’avenir de notre planète, cette mobilisation sans précédent envoie, sur l’un des thèmes du grand débat national, un message clair au gouvernement sur la nécessité pour lui de conjuguer transition écologique et transition économique et sociale.
Motif d’espoir aussi, parce que cette démarche est respectueuse de l’état de droit : ce n’est pas par des menaces de violence que l’exigence environnementale est portée, mais par une menace de recours devant les tribunaux pour faire valoir le droit à un environnement durable. On pense à Martin Luther King obtenant de la cour suprême des Etats Unis qu’elle juge illégale les lois ségrégationnistes des Etats du sud.
Motif d’espoir aussi car cettte démarche, inédite, peut aussi faire progresser ce droit à un environnement durable, comme un des droits de l’humanité, comme s’y emploient également le groupe des juristes qui ont lancé le pacte mondial pour l’environnement : il faut à la fois des actes juridiques, lois ou traités, qui traduisent les décisions politiques, mais aussi des tribunaux pour les faire respecter. Et leur jurisprudence peut aussi faire progresser le droit environnemental, comme elle a fait progresser dans le passé le droit social.
Motif d’espoir, mais avec une inquiétude toutefois, et elle est de taille : celle du temps nécessaire pour que ces recours aboutissent. Si, constatant que les pouvoirs publics n’ont pas pris les mesures nécessaires, un recours est déposé dans deux mois devant le tribunal administratif, il faudra au moins un an et demi avant qu’il aboutisse à une décision, dont on ne sait ce qu’elle sera et qui pourra ensuite faire l’objet de recours devant le conseil d’Etat, voire devant les instances européennes ou internationales. Et pendant ce temps là « la maison continue à brûler ».
Espérons donc, en ce début d’année, que les pouvoirs publics arrêterons de « regarder ailleurs » et n’attendrons pas d’être éventuellement condamnés pour mettre en œuvre les mesures énergiques nécessaires pour contribuer efficacement à arrêter le processus infernal de réchauffement de la planète.
Paris, le 7 janvier 2019.
Addendum
Le nombre de signatures a dépassé le nombre de 2 millions. Bravo.
Paris, le 11 janvier 2019
Vivre sans espoir c’est cesser de vivre écrivait Dostoïevski dans sa narration de ses années de bagne auxquelles il a survécu.
Dans la période trouble que nous vivons, ce sont plus les raisons de désespérer voire de prendre le chemin de l’obscurantisme qui prévalent et sont entretenus en boucle par les média. De fait, on ne voit pas d’issue, on en oublie les avancées, les sursauts et mobilisations (et je ne parle pas du mouvement des gilets jaunes) auxquels les réseaux sociaux pour le coup peuvent contribuer efficacement et utilement.
Al Gore dans son ouvrage The future pense que nous avons le choix entre deux voies : celle du futur et celle qui mène inexorablement à la destruction de notre monde. Je pense que l’avenir de notre planète semble bien compromis et qu’il n’y a plus qu’une seule voie qui s’ouvre à nous et pour autant, il faut a minima tout mettre en oeuvre pour ralentir ce processus. C’est le moins que l’on puisse faire pour les générations futures. Bien sûr la voie du recours juridique ne suffira pas. Mais ce qui est important c’est la force de cette mobilisation qui ne faiblit pas et qui permet aujourd’hui de ne plus pouvoir occulter le sujet de la transition écologique.
Alors merci pour cette bouffée d’espoir bienvenue mettant en exergue le succès de l’appel L’affaire du siècle que j’ai signé aux côtés de 2 millions d’autres signataires sans compter tous ceux qui soutiennent par ailleurs cette démarche.
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