J’emprunte le titre de cette carte de vœux, plus civique et professionnelle et moins spirituelle que la précédente, à Charles Péguy, dont les trois articles « De la grippe », Encore de la grippe », « Toujours de la grippe » publiés en 1900 dans les cahiers de la quinzaine qu’il venait de créer, viennent d’être réédités. Cela m’a conduit, pour une fois, et dans le titre seulement, à respecter le féminin imposé à « Covid » par la secrétaire perpétuelle de l’Académie française par référence au genre lui aussi féminin du mot maladie (que n’existe-t-il un neutre dans cette belle langue qu’est la nôtre ? Voilà un chantier auquel devrait s’atteler l’Académie).
Dans ces textes sous forme d’un dialogue avec son médecin, « docteur socialiste révolutionnaire internationaliste », Péguy évoque l’effet sur lui de la maladie qu’il a contractée, mais en fait aussi une métaphore des maladies qui affectent la société de son temps, comme la pensée socialiste à laquelle il se rattache. C’est dire si, malgré la distance, et un contexte fort différent, ces trois textes ont pu me parler, ayant été moi-même touché par la maladie, avec des séquelles auxquelles je ne m’attendais pas, et ayant eu à réfléchir sur ce que cette pandémie a révélé sur nos économies et nos sociétés et sur les politiques publiques qui ont été conduites pour y répondre (Cf. sur ce blogue le #Covid19). L’idée d’en faire une métaphore des maux qui affectent nos sociétés et de notre noosphère mondiale m’a paru une bonne façon de structurer mes vœux citoyens pour 2021.
De la Covid, encore de la Covid, toujours de la Covid.
En guise de vœux pour 2021.
Que 2021 nous préserve des faux diagnostics, des choses mal nommées, des mots mal choisis, qui ajoutent aux maux du monde,
Que 2021 nous préserve des faux remèdes, des faux prophètes et des vrais charlatans qui prétendent avoir trouvé la panacée -universelle, cela va sans dire- aux maux -à tous les maux, bien sûr- de nos corps, de nos esprits et de nos sociétés,
Que 2021 abolisse la distance physique imposée par la circulation virale et nous permette de retrouver le sens du partage des plaisirs des sens,
Que 2021 fasse tomber les masques et les voiles, tout ce qui masque et tout ce qui voile ces beaux visages humains dans ce qu’ils expriment de notre être au monde,
Que 2021 nous vaccine contre ces virus qui affectent la noosphère, faits alternatifs et autres infox, et font de la communication non la meilleure mais la pire des choses,
Qu’en 2021, le vaccin de la laïcité nous protège des mutations totalitaires des idéologies et des religions,
Que 2021 nous évite l’hystérisation des débats, cette fièvre malsaine qui affecte nos disputes démocratiques, et nous rend sourds à la contradiction,
Que 2021 nous préserve de la recherche de boucs émissaires, responsables illusoires et fantasmés de la pandémie et de la violence sociale,
Qu’en 2021 nous ayons le courage de faire de cet événement imprévu une expérience utile pour panser la vie commune, entretenir nos communs, et repenser l’avenir,
Qu’en 2021 nous n’oubliions pas ce que nous a appris le virus de notre proximité mammifère et de notre solidarité avec le reste de la nature dont nous sommes partie,
Que 2021 renforce en nous l’élan de fraternité, le désir d’être frères et sœurs en humanité.
Paris, Croulebarbe, le 3 janvier 2021.
Merci Daniel pour vœux j’aime votre prose
Ce sont de belles pensées laïques et bienveillantes merci Daniel
merci pour ce beau texte
le Covid, car je préfère en l’occurrence le masculin, nous renvoie aussi à notre fragilité humaine et à notre mortalité qu’il ne faut jamais oublier…
Meilleure année à toi aussi
Bravo , merci pour ce texte stimulant et l’heureuse référence à Charles Peguy, si grand héros de notre roman national.
Cela donne envie de vous lire plus souvent.
Merci pour ces bons voeux et l’espoir qu’ils entretiennent.
Pour ma part, étant peu attirée (à tort peut-être ?) par la prose de Charles Peguy, je relayerai Victor Hugo: « Saluons ensemble cette nouvelle année qui vieillit notre amitié sans vieillir notre coeur »…
Merci Daniel pour tes bons vœux citoyens.
Reçois en retour les miens.
Un merci spécial pour cette belle prose.