Les dépassements d’honoraires des médecins se multplient, selon UFC-Que Choisir qui cible les gynécologues. D’entendre les conclusions du dossier élaboré par l’UFC sur les dépassements d’honoraires m’a replongé prés de 20 ans en arrière, quand mon successeur à la Cnam a mis fin à la stratégie de lutte contre les dépassements d’honoraires -ce cancer de la politique conventionnelle- que j’avais développée depuis deux ans ; celle-ci reposait sur trois idées dont je n’ai pu développer réellement que les deux premières :
- Développer une stratégie de contrôle contre les dépassements d’honoraires illégaux ou abusifs. Ces contrôles ont été abandonnés dès après mon départ. C’est aussi à ce titre que j’avais attaqué pour entente illégale, devant le conseil de la concurrence qui a fini par le condamner, un syndicat de dentiste qui avait fixé de façon unilatérale un tarif supérieur au tarif conventionnel pour les soins conservateurs.
- Rémunérer correctement les actes médicaux, en commençant par les actes techniques : c’était l’enjeu des négociations sur la classification commune des actes médicaux (CCAM), basée sur une évaluation objective des « coûts de production » et qui conduisait à revaloriser de façon importante les actes de certaines spécialités (la chirurgie par exemple) avec en contrepartie des baisses significatives pour des spécialités qui bénéficiaient (déjà) d’importantes rentes de situation (comme la biologie ou la radiologie). Cette négociation qui a failli aboutir, a été abandonnée là aussi dés après mon départ.
- Rémunérer correctement les actes cliniques, en contrepartie d’engagements de qualité et de ce qu’on appellerait aujourd’hui de « sobriété », avec ce qu’on appelait des accords de bon usage des soins. C’est ce que j’avais fait pour la revalorisation de la consultation, la C, passée à 20 € après la nomination de Jean-François Mattei comme ministre de la santé, et qui était conditionnée par des engagements de bon usage des soins (comme par exemple sur le recours à la visite à domicile, ou l’usage des antibiotiques). Mais aller plus loin aurait supposé (c’est encore le cas aujourd’hui) de sortir de la rémunération à l’acte et passer à des rémunérations, au moins en partie, forfaitaires dans le cadre d’une nouvelle classification des activités cliniques. Travaux qui, à ma connaissance, ont été abandonnés.
La stratégie adoptée après mon départ a conduit à régulariser les dépassements en essayant de les réguler avec un dispositif, devenu depuis l’Optam (option tarifaire maîtrisée) qui était supposé permettre, comme son nom l’indique, de limiter les dépassements facturés par les médecins de secteur 2.
En matière de politique sociale les effets structurels des décisions mettent du temps à se révéler. C’est ce qui s’est passé avec le mode de régulation de l’Ondam mis en place, là aussi après mon départ. C’est visiblement ce qui s’est passé aussi avec la stratégie de régulation des dépassements.
Paris, Croulebarbe, le 22 février 2024 (mis au point le 24)
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