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Tous citoyens !

Marisol Touraine, ministre des affaires sociales de la santé et des droits des femmes et Laurence Rossignol, secrétaire d’État chargée de la Famille, des Personnes âgées et de l’Autonomie, ont souhaité réunir, le 23 janvier, avec Jean-Louis Deroussen, président du conseil d’administration de la Cnaf et moi-même, l’ensemble des présidents de conseil d’administration et des directeurs des caisses d’allocations familiales pour manifester la mobilisation de l’ensemble de la branche Famille autour de la promotion et de la défense des valeurs de la République. Promotion et défense à la fois. La promotion des valeurs au travers de notre action pour l’accès au droit, pour développer le lien social et pour accueillir dans les Caf chaque membre de la communauté nationale. Mais aussi la défense en contribuant à protéger les allocataires et la communauté nationale de ceux qui veulent déstabiliser la République.

Dans la foulée, j’ai, avec Jean-Louis Deroussen, organisé une réunion avec l’ensemble de nos partenaires nationaux le 28 janvier pour voir avec eux comment nous devons approfondir ou adapter nos actions aux problèmes révélés par les drames nationaux que nous avons connus et qui ont conduit au grand mouvement d’unité nationale du 11 janvier et dont il faut prolonger les effets.

Les attentats des 7, 8 et 9 janvier ont conduit la communauté nationale à vouloir redonner des couleurs plus visibles aux valeurs fondamentales de la République. L’horreur a fait prendre conscience du caractère très concret de ces « vertus » républicaines, notamment la « troisième vertu » la fraternité, dont la Sécurité sociale, que nous allons célébrer cette année par son 70ème anniversaire, est une des expressions concrète, et peut être en son sein plus encore la branche Famille, compte tenu de son action en direction des plus fragiles.

 Tous citoyens

 La première mission des organismes de sécurité sociale est l’accès aux droitx 1. Permettre à tous, notamment à ceux qui sont en situation d’exclusion ou de relégation, d’accéder aux droits est un des moyens de réduire les risques d’exclusion et de relégation et donc les dérives qui peuvent en résulter, même si la précarité est loin d’être le seul facteur ni même le facteur principal des dérives radicales. Cet objectif d’amélioration de l’accès aux droits est au cœur de la politique conduite par les Caf 2. D’ores et déjà en 2014 nous avons réalisé près de 150 000 rendez-vous des droits en neuf mois, soit beaucoup plus que l’objectif de 100 000 rendez-vous des droits prévus par la Cog. A contrario comme on ne peut dissocier l’accès aux droits de la lutte contre la fraude 3 il est essentiel de ne pas maintenir les droits de ceux qui, d’eux-mêmes, s’excluent de la communauté nationale, pour rejoindre des forces qui s’attaquent aujourd’hui à la République. Depuis plusieurs mois les Caf vérifient les signalements qui sont communiqués par le ministère de l’intérieur, et procèdent à la suppression immédiate ou à la radiation des droits quand le départ au djihad est avéré. Ces contrôles se font bien sûr dans le respect des libertés publiques et, notamment, des règles posées par la Cnil.

 Le deuxième terrain sur lequel la Branche doit encore renforcer son action, déjà considérable même si elle est assez peu connue, est celui de la promotion du lien social et de l’accompagnement des familles. Cette action pour promouvoir le lien social est importante, et aussi mal connue : elle se concrétise dans des actions d’animation de la vie sociale, notamment au travers des centres sociaux, d’activités périscolaires et plus généralement d’accueil des enfants et des jeunes 4, de l’accueil de la petite enfance 5, des dispositifs d’appui à la parentalité, d’accès aux vacances… 6. Elle s’appuie sur les partenariats, principalement avec les collectivités locales et les associations. Ces lieux de socialisation et d’éducation sont essentiels à la fois pour maintenir et développer le lien social, mais aussi pour porter et incarner les valeurs de la République, notamment le principe de laïcité qui est au confluent des trois valeurs de notre devise nationale 7. Ce principe de laïcité ne s’oppose pas à des partenariats avec des organisations ayant une référence confessionnelle, philosophique ou autre, dès lors que leur objet n’est pas d’ordre cultuel mais bien social et éducatif, et qu’elle s’interdise tout prosélytisme, toute exclusion et toute volonté de s’imposer aux autres.

Ces actions sont particulièrement importantes dans les quartiers en difficultés, ceux où la relégation conduit à des déchirures dans le tissu social, dans lesquels les djihadistes cherchent à s’engouffrer pour élargir ces déchirures 8. C’est la raison pour laquelle les Caf mettront en œuvre en priorité les actions prévues dans la Cog dans les quartiers de la politique de la ville. La Branche va également expérimenter, en priorité dans ces quartiers et avec nos partenaires, l’accueil de volontaires du service civique, qui est aussi l’occasion de faire vivre les valeurs de la République par des jeunes 9.

Les actions pour développer ou maintenir le lien social s’appuient sur des partenaires, pour l’essentiel les municipalités et les associations 10. Celles-ci s’obligent, dans leur action, à respecter le principe de laïcité, ce qui n’interdit pas la possibilité pour les convictions de s’exprimer (ce qui peut d’ailleurs favoriser les dérives radicales) mais suppose qu’aucune ne veuille s’imposer aux autres, ne développe le prosélytisme, ou n’exclue les autres.

Si les fondamentalismes religieux et leur intolérance sont les terreaux sur lesquels se développent les radicalismes 11 on ne peut pour autant les assimiler l’un à l’autre. Pour ce qui concerne les événements récents, de même que l’Islam ne doit pas être confondu avec l’islamisme, le djihadisme ne doit pas être confondu avec l’islamisme, même si c’est sur ce terreau que l’Islam radical se développe 12.

Au-delà du respect des principes de laïcité, il est donc également nécessaire d’être vigilant sur les risques d’infiltration des activités du lien social par des radicaux. Sans pour autant tomber dans la paranoïa ou la délation ni a fortiori stigmatiser les croyants de telles ou telles religions, et dans le cas présent, l’Islam 13. Entre naïveté et surveillance, l’équilibre est difficile à trouver et pourtant nécessaire 14.

Il ne faut pas oublier que les familles confrontées à la radicalisation d’un de leur membre en sont les premières victimes. C’est d’ailleurs l’un des objectifs des radicaux que de casser le lien familial. « Déchoir les parents de leur légitimité et donc de leur autorité constitue l’un des objectifs principaux des radicaux », 15.

C’est la raison pour laquelle il est important que toutes les familles confrontées à la radicalisation puissent bénéficier d’un appui adapté 16.

De même les familles confrontées à un départ au djihad vivent-elles, un drame qu’on peut assimiler au suicide d’un enfant 17 et nécessitent un accompagnement adapté.

 Ces valeurs de la République, les Caf contribuent aussi à les rendre visibles, dans leur accueil et dans tous les contacts avec leurs allocataires.

Liberté d’abord, respect des libertés publiques dans les contrôles, mais aussi liberté d’accès aux accueils et tout autant au site caf.fr qui permet aujourd’hui à une part importante des allocataires de réaliser des déclarations en ligne, d’accéder à leur compte et d’être informés de leur droit 18 . Cela confirme la nécessité d’une vigilance particulière sur les risques d’attaques sur internet 19.

Égalité ensuite. Égalité d’accès à nos accueils, quelle que soit l’origine de nos allocataires, c’est ce qu’ont voulu mettre en évidence les agents d’accueil de la Caf de l’Hérault 20. Cela implique notamment le respect des principes de laïcité par les collaborateurs, ce qui exclut le port de tout signe ostentatoire de convictions personnelles, quelle que soit leur nature 21. A cet égard, il est essentiel là aussi de rappeler que cela s’applique à tous les signes ostentatoires, quelles que soient leur nature et quelles que soient les convictions exprimées.

Fraternité enfin. Nous avons comme objectif d’accueillir dans des conditions plus conviviales les allocataires, ce qui s’est traduit dans la réorganisation des accueils et notamment la généralisation de l’accueil sur rendez-vous, qui est plébiscité par les allocataires 22 et qui devrait être généralisé à la fin du premier semestre 2015. Fraternité c’est aussi éviter les incivilités des allocataires vis-à-vis des agents d’accueil des Caf. A la suite des évènements de début janvier il semble que se soient développés deux types d’incivilités. D’une part, des propos de la part d’allocataires se référant aux attentats djihadistes et menaçant de perpétrer des actes analogues vis-à-vis des Caf. D’autre part, des attaques verbales, de la part d’autres allocataires, vis-à-vis des agents d’accueil « issus de la diversité » en leur reprochant leur origine et leurs liens supposés avec les auteurs des attentats.

Certes il s’agit de signaux faibles mais c’est bien ce que cherchaient les auteurs des attentats : dresser les membres de la communauté nationale les uns contre les autres. Face à cette tentative, la seule réponse de la République est celle qui prolonge les manifestations du 11 janvier et qu’ont su si bien exprimer les agents de la Caf de l’Hérault.

Tous citoyens !

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